A propos de dogme et d'hérésie
Une des définitions du Larousse, à propos du mot dogme, me plaît particulièrement : « opinion donnée comme certaine, intangible et imposée comme vérité indiscutable ».
Enfant, nous croyons ce que les adultes nous apprennent sans restriction. En grandissant, nous remettons en cause certaines informations. La vérité devient discutable. Mais nous ne revenons pas sur tout l'enseignement reçu, par manque de temps, de goût ou de curiosité. Certains dogmes demeurent ainsi vivants. C'est le cas du dogme chrétien, comme de celui d'autres religions.
Le livre d'Herbert Krosney, intitulé « L'évangile perdu, la véritable histoire de l'évangile de Judas », aux éditions Flammarion, est riche d'enseignements sur les premiers chrétiens. Les informations suivantes sont directement tirées de ce livre.
Il est généralement admis que Jésus serait mort en l'an 30 de l'ère chrétienne. Dans les premiers temps, ceux qui croyaient à sa divinité n'étaient considérés que comme une secte juive de plus. Les Apôtres se considéraient comme des Juifs qui auraient rencontré le Messie et croiraient en lui. Moins de dix ans après la mort du Christ, un rabbin appelé Saul de Tarse, qui comptait parmi les adversaires les plus acharnés du Messie, eut une révélation divine sur la route de Damas. Il embrassa alors l'idée que Jésus était le Messie, et propagea, sous le nom de Paul, la nouvelle religion en la rendant accessible à tous, juifs et non juifs. Il expurgea la religion de ses exigences les plus pénibles, comme la circoncision ou les lois alimentaires, pour faciliter la conversion à la nouvelle foi.
La découverte en 1945 des manuscrits de Nag Hammadi fournit de nouvelles informations aux spécialistes de l'Antiquité. Le monde du christianisme primitif était extrênement turbulent. Dans cet univers d'une grande diversité circulaient non seulement les quatre Evangiles qui figurent aujourd'hui dans la Bible, mais de nombreux autres, chacun prétendant détenir la vérité. Chaque secte proposait une variante de la doctrine chrétienne. Les gnostiques développaient notamment un courant de pensée influent. Marvin Meyer, titulaire de la chaire d'études du Nouveau Testament à l'université Chapman (Californie), définit les gnostiques comme « des mystiques religieux qui proclamaient la gnôsis, "connaissance", comme voie du salut. En parvenant à la connaissance parfaite de soi, ils pensaient connaître Dieu directement, sans passer par les rabbins, prêtres, évêques, imans et autres dignitaires religieux ». Ils donnaient notamment un rôle majeur aux femmes. Elaine Pagels, professeur à l'université de Princeton (New Jersey) fait remarquer que l'Evangile de Philippe attribue à Jésus des actes et des paroles très différents de ceux du Nouveau Testament. Dans un passage, Marie-Madeleine est dite compagne du Sauveur. On apprend en outre que le Christ l'aimait plus que tout autre disciple, et qu'il l'embrassait souvent sur la bouche.
Irénée, né probablement à Smyrne en Turquie, devint l'évêque chrétien de la ville de Lyon et vécut approximativement entre les années 120 et 202. Il chercha à unifier la chrétienté autour d'un ensemble de textes. Tout comme l'existence de quatre vents et de quatre directions, il ne pouvait exister selon lui que quatre Evangiles. Il retint les Evangiles de Matthieu, Marc, Luc et Jean et affirma qu'ils étaient d'inspiration divine. Tout autre texte devenait une hérésie. Parmi les chrétiens dissidents, Irénée, auteur du traité Contre les hérésies fustigeait les gnostiques.
En 313, l'empereur romain Constantin officialisa la religion, et les chrétiens purent pratiquer leur foi en toute liberté. Athanase, né vers 295 à Alexandrie, prit part au concile de Nicée en 325 qui adopta les doctrines d'Irénée, et fut nommé évêque à l'été 328. Il joua un rôle clé dans l'unification chrétienne en définissant en 367 le canon des textes saints seuls admissibles, à savoir les quatre Evangiles retenus par Irénée, puis les sept Actes des Apôtres et Epîtres appelées catholiques, quatorze Epîtres de Paul, et l'Apocalypse de Jean.
La constitution du Nouveau Testament en tant que Bible chrétienne fut un lent processus qui prit plusieurs siècles. Ce n'est qu'au Concile de Trente, en 1545, que l'Eglise catholique romaine décida d'établir la liste définitive des livres bibliques canoniques, à laquelle il est impossible d'ajouter ou d'enlever quoi que ce soit.
La messe était dite.