La suite ?
La suite ? Elle pourrait ressembler à ça :
Le comédien éclata de rire. Il était redevenu collégien. Sur l'air du Livre de
Une heure encore à attendre. Les panoplies d'acteur et de chanteur étaient épuisées. L'impatient retourna devant l'ordinateur pour voler quelques minutes.
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L'écran de l'aéroport annonçait l'atterrissage de l'avion d'Air Maroc. Les familles arabes venaient accueillir un proche, dans le bruit et la bonne humeur. De nombreux voiles s'agglutinaient devant la porte des arrivées.
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Orly n'est pas triste le dimanche, songea Pierre. Brel s'est trompé d'endroit. Il a échoué à la porte des départs.
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La fougue sensuelle laissait place à celle des paroles. Alice amorça le flot.
- Tu as changé ! Ton regard est plus serein. Tu sembles plus costaud aussi. Qu'est-ce que tu as fait à tes mains ? Elles sont toutes abîmées. Qu'est-ce que tu m'as manqué !
Les mots se déversaient en cascade, et l'accent du Sud creusait les vagues. Pierre éclata de rire.
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Pierre se souviendra longtemps de ce carrosse. Les sièges en cuir étaient usés, au point de signifier leur dédain au postérieur des voyageurs. Le jeune homme n'eut pas le temps de récuser la vieille Mercedes. Alice, frigorifiée, s'y était engouffrée. Elle n'attendait que son amoureux pour se blottir contre lui. Il aurait fallu être un goujat pour émettre une quelconque hésitation. Même les sièges l'invitaient à entrer dans l'habitacle. Ils trouvaient le couple sympathique.
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Pierre réalisa qu'il avait chaviré. Le naufrage aurait dû éclabousser sa passagère. Il prit conscience que le matelot était resté à quai.
Je parle peut-être trop, je l'ennuie. Je ne lui laisse pas le temps de parler. Non, ce n'est pas ça. Elle m'aiguille, pour éviter de parler d'elle. Elle a quelque chose à cacher. Ou alors je me fais des idées, je complique tout.
Pierre interrompit le silence.
- Et toi, tu ne me parles pas de toi. Tu étais dans le désert d'après ton mail.
- Dans les déserts. Je veux faire un article sur les femmes du désert.
Le désert était dans la pièce, la suite de l'histoire n'arrivait pas. Alice baillait.
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Carole n'avait pas encore abordé le sujet d'Alice. Elle profitait d'abord de la paix retrouvée. Elle se méfiait aussi des réactions de son frère. Ce dernier avait du mal à exprimer les sentiments qui le touchaient de près depuis qu'il avait grandi, et risquait de se fermer comme une huître. Pourtant, au lycée, ils se disaient tout sur leurs partenaires respectifs. Absolument tout. Même sur leurs performances de litières. Carole attendait le bon moment. Elle avait plus d'un tour dans son sac, dont un couteau à huître.
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L'allégresse endormait le frérot. Il était tant d'assaillir la forteresse et de découvrir la princesse Alice. Dès la première offensive, Carole fut repoussée dans les douves. Mais elle ne battit pas en retraite. Elle possédait une arme secrète, le bâton que lui avait donné Pierre le matin même.
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Carole s'était trompée, Alice n'était pas une princesse, mais une reine. Puis la semi-idylle niçoise apparut, avec son lot de doutes. Le royaume avait des failles. Le récit du garçon fut sincère, mais incomplet.
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La virtuose du goût et de l'odorat s'agitait en cuisine où régnait le chaos. L'évier croulait sous les moules, pelles à tartes, louches, doseurs, buses, économe, et autres ustensiles préparatoires, semblables aux instruments lyriques d'une fosse d'opéra. Le garçon flaira la tension du chef d'orchestre et préféra fuir le Beyrouth culinaire. Il posa ses cadeaux aux pieds du sapin. La barrière colorée de présents, telle un Merlin côtier, cachait la beauté passée. Pierre entreprit de dompter l'architecture anarchique. Après délocalisation des édifices imposants,
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Le garçon osa une entrée en cuisine. La guerre y faisait rage. Une victime rôtissait dans le four, baignant dans son jus. Les corps sucrés de deux autres prisonniers refroidissaient sur la desserte souillée de farine. Un rouleau à pâtisserie gisait à côté. La cuisinière était concentrée. Pierre se fit discret et efficace. Il reconnut les compositions apéritives qu'il transféra au salon. Puis il se fit plongeur, nettoyant et rangeant les armes de pré-dégustation massive. Le garçon observait à la sauvette la gourmandise de sa mère. Elle goûtait tous les plats sous le prétexte de vérifier la qualité, et s'attardait plus particulièrement sur les mets sucrés.
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Les petits doigts rieurs collés à la sonnette, annoncèrent la venue de Sibylle et Damien. Les « C'est nous » de l'interphone démasquaient les voix d'enfants.
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Après les bises des adultes dressés sur leur passage, puis les bises réclamées en retour par les mêmes adultes, puis les parents qui voulaient enlever bottes, manteaux, bonnets et écharpes, les enfants foncèrent vers le sapin.
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Tous les ans c'est la même chose. Il faut attendre. Attendre tata Carole et tonton Julien qui sont toujours en retard. Mamie est ennuyée mais elle laisse dire papa et maman. Heureusement que Pierre est rigolo. Au moins, on peut jouer avec lui. Mais pas tout le temps, il faut aussi des fois qu'il parle avec les adultes.
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- J'te jure. Il gare son traineau contre le balcon. Il balance les cadeaux sur le balcon et il attend. Comme mamie, elle fait beaucoup la cuisine à Noël, elle ouvre la porte pour aérer. Et hop ! Le Père Noël, il fonce mettre les cadeaux sous le sapin.
- Ouah ! Trop fort ! Mais alors, t'as vu le Père Noël !
- Ben ouais !
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Il voudra me soutirer de l'argent pour ses pauvres, et je le lui refuserai. Je lui dirai qu'il ne fait que donner de l'argent qui part en fumée. Je sais qu'il s'occupe des dépenses de première nécessité, mais ce n'est pas une solution. Il se mettra en colère, mais je tiendrai bon. Je lui clouerai le bec en affirmant qu'il a son réseau de bigotes pour cela. Donne-moi des projets d'avenir au lieu de boucher les trous, et je t'ouvre un crédit. Pas besoin de projets grandioses. Une femme achète à crédit un coq et une poule, et elle retirera les revenus de la vente des œufs. De temps en temps, elle gardera des œufs à couver, et elle aura d'autres poules. Et elle pourra me rembourser. Attention, Charles ! Je ne fais pas ton vœu de pauvreté. Je ne donne pas, je prête et les gens me remboursent. Quitte à ce que je prenne en garantie tes deux soutanes. Et devant ma détermination et mon culot, j'espère qu'il rigolera. Il rigolera, c'est sûr. On est tellement faits pour s'entendre.
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A suivre ? ... Peut-être.